sexta-feira, 24 de outubro de 2014

Barroso quitte Bruxelles par la petite porte

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«José Manuel Durao Barroso a commencé son premier mandat à la tête de la Commission, en 2005, par le double non français et néerlandais au projet de constitution européenne. Il termine le second avec un FN à 25 % en France et des partis eurosceptiques qui ont poussé un peu partout comme des champignons. Deux évènements qui symbolisent ce que fut le règne de l’ancien Premier ministre du Portugal : sans aller jusqu’à l’accuser de s’être «acharné à faire haïr l’Europe», comme l’a clamé mardi après-midi à Strasbourg l’eurodéputé communiste Patrick Le Hyaric, Barroso n’a en tout cas rien fait pour la faire aimer. Rares, très rares seront ceux qui regretteront de le voir quitter le 13ème étage du Berlaymont, le siège de la Commission européenne à Bruxelles, le 3 novembre prochain. D’ailleurs, pour assister à ses adieux au Parlement, il n’y avait que 170 eurodéputés (sur 751) présents dans l’hémicycle, essentiellement ceux de sa famille politique, les conservateurs du PPE. Une misère.
Le plaidoyer pro domo –prononcé uniquement en anglais- qu’a livré Barroso était un rien pathétique : alors qu’on attendait un minimum de hauteur de vue et de pistes pour l’avenir, alors que l’Europe est au bord de la déflation, alors que l’europhobie se répand dans l’Union, essentiellement dans les pays fondateurs, alors que rien ne semble endiguer la montée du chômage, il a joué en défense, essayant de démontrer qu’il avait été le «right man at the right place», le capitaine du navire Europe affrontant les tempêtes institutionnelles (le rejet de la Constitution européenne) et financières (la crise de la zone euro). Aucun début d’autocritique, aucun regret de laisser le navire en péril, juste un boutiquier tentant de démontrer qu’il laisse les comptes en ordre : les dysfonctionnements de l’Union, qu’il admet, ne sont pas de son fait, mais des États.

Il n’a pas totalement tort, évidemment, rien ne pouvant se faire sans eux. Mais, celui qui s’est dit dès 2004 «au service des États», n’a jamais été la force de proposition qui aurait permis à l’Union d’éviter ou de surmonter les écueils. Placé à la présidence de la Commission grâce à l’entregent de son ami Tony Blair, qui venait de poser un veto à la nomination du trop fédéraliste et pas assez atlantiste Guy Verhofstadt, l’homme qui a accueilli, en tant que Premier ministre portugais, le sommet des Açores au cours duquel Georges W. Bush a déclaré la guerre à l’Irak, n’a jamais été là pour renforcer politiquement l’Europe, bien au contraire.

Il a fait plus pour affaiblir l'Union que les «no» de Margaret Thatcher

Ainsi, son acharnement à défendre jusqu’au bout la proposition de directive Bolkenstein, c’est-à-dire jusqu’au non français dont il porte une part non négligeable de responsabilité, a fait plus pour affaiblir l’Union que les «no» à répétition de la dame de fer, Margaret Thatcher… De même, lorsque Barroso regrette devant le Parlement l’impréparation de la zone euro lors de la crise des dettes publiques pour expliquer trois ans de cafouillage, il oublie qu’il était un militant convaincu de la déréglementation estimant que les «codes de bonne conduite» non obligatoire suffisaient amplement. Il a notamment fermement soutenu son commissaire au marché intérieur entre 2004 et 2009, l’Irlandais ultralibéral Charlie MacCreevy, qui refusait toute réglementation des marchés financiers. On a vu le résultat.
Ce n’est donc pas un pur hasard si la gestion de la crise institutionnelle de 2005, il jugeait à l’époque que le rejet du traité constitutionnel était un problème purement français, puis celle de la crise de la zone Euro, lui ont échappé, celles-ci étant traitées directement par Berlin et Paris. Jamais la Commission n’a été à l’initiative : d’exécutif, elle est devenue, sous le règne de Barroso, un simple secrétariat des Etats membres. Les rares moments de courage de l’ex Premier ministre portugais, c’est-à-dire lorsqu’il s’est rappelé qu’il disposait du monopole d’initiative, n’ont jamais résisté très longtemps aux froncements de sourcils des États membres. Par exemple lorsqu’il a proposé la création d’obligations européennes ou lors de la négociation des perspectives financières de l’Union pour la période 2014-2020 : dans les deux cas, il s’est misérablement couché, évitant de pointer la responsabilité des États. Le plus souvent, il recule avant même d’avoir avancé : ainsi, on attend toujours sa proposition de modifications des traités destinée à renforcer l’Union et à démocratiser son fonctionnement, une promesse formulée il y a plus d’un an…

Pas un éclat de voix en dix ans passés à la tête de la commission de présidence
RTR33ISHBarroso a réussi l’exploit de paraître encore plus timoré que le président du Conseil européen des chefs d’État et de gouvernement, le pourtant très pâlot Herman Van Rompuy. Celui-ci a, par exemple, osé monter au créneau face à la chancelière allemande, Angela Merkel, en décembre 2012, pour défendre la création d’un budget de la zone euro. En revanche, on attend encore les coups de gueule du président de la Commission pour marquer ses désaccords. Il est facile aujourd’hui d’incriminer les États membres quand on n’a pas eu le courage pendant dix ans d’élever la voix. Il peut, certes, faire valoir qu’il n’était soutenu ni par Paris, ni par Berlin, à la différence d’un Jacques Delors qui pouvait compter sur François Mitterrand et sur Helmut Kohl. Mais, tout n’était pas rose du temps de Delors et surtout celui-ci a su bâtir des relations de confiance avec ses pairs, ce que Barroso a été incapable de faire. Pour ne rien arranger, il s’est épuisé, au cours des cinq dernières années, à empêcher que Van Rompuy devienne le seul visage de l’Union à l’extérieur, le collant dans tous ses déplacements internationaux. Il a simplement oublié que ce n’est pas la photo qui fait la différence, mais le fond.
Et Barroso n’en a jamais eu beaucoup comme le montre sa brutale conversion à la réglementation des marchés financiers après 2009. Celui dont le nom en portugais signifie «dur argileux» n’a pas barguigné lorsque les États, l’Allemagne et la France en particulier, ont sifflé la fin de la récréation. Mais jamais il n’a été à l’origine de l’extraordinaire approfondissement de l’Union auquel on a assisté ces dernières années. Même l’Union bancaire, ce saut fédéral sans précédent lancé en juin 2012, n’est pas une idée de la Commission, Barroso s’étant contenté, en 2009, de la mise en place d’une surveillance légère des établissements financiers qui a rapidement montré ses limites.

Et que dire de sa gestion des programmes d’austérité mis en place dans les États de la périphérie de la zone euro ? La Commission, en se montrant encore plus rigoureuse que le FMI, a fait preuve d’une totale absence de sens politique, Barroso n’osant même pas aller affronter sur le terrain les opinions des pays contraints de couper dans leurs dépenses publiques. Le Portugais a réussi l’exploit, en endossant des habits trop grands pour lui, de faire apparaître le FMI comme une institution plus humaine que la sienne. Est-ce un hasard si, dans son discours d’adieu, il n’a prononcé ni le mot de «citoyen», ni celui de «chômeur» ?

Le Tafta lancé en pleine crise à un an des Européennes

Enfin, pour clore ce long, trop long, règne, Barroso a commis une bévue aussi grave que sa défense hallucinée de la directive Bolkestein en 2004-2005. Pour complaire aux Américains (il espérait alors décrocher un poste international, soit à l’OTAN, soit à l’ONU), il a lancé en 2013 la négociation d’un traité de libre-échange avec les États-Unis (Tafta), en pleine crise économique et alors que les opinions publiques doutent de plus en plus des bienfaits de la mondialisation. Il ne pouvait pas fournir meilleur argument aux eurosceptiques à un an des Européennes… Le résultat a été à la hauteur des pires craintes, notamment en France où le FN a atteint 25 % des voix, cette négociation lui permettant de dénoncer la folie «ultralibérale» de l’Europe.[...]»

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