«J'ai
passé la semaine en Grèce, notamment pour suivre Pierre Moscovici qui
effectuait sur place sa première visite officielle comme commissaire aux
affaires économiques et monétaires. Voici la version longue de mon
reportage paru dans Libération daté du 18 décembre.
Les
marchés ont voté : pour eux, la Grèce n’est absolument pas prête à voler
de ses propres ailes, cinq ans après qu’elle ait dû appeler à son
chevet ses partenaires de la zone euro ainsi que le Fonds monétaire
international (FMI). Alors que l’Espagne, l’Irlande et le Portugal sont
sortis sans coup férir de leur programme d’aide, la Grèce s’est pris les
pieds dans le tapis en ne parvenant pas à s’entendre avec la troïka
(Commission, Banque centrale européenne, FMI) sur les nouvelles mesures
d’austérité conditionnant le versement de la dernière tranche d’aide
européenne (1,8 milliard d’euros sur un total de 240 milliards).
Surtout, la perspective d’élections législatives anticipées fin janvier, 18 mois avant le terme normal de la législature, est devenue plus que probable, la majorité actuelle n’ayant pas le nombre de voix nécessaire pour faire élire un nouveau président de la République. Ce qui devrait amener au pouvoir la gauche radicale de Syriza, un épouvantail tant pour les autorités européennes que pour les marchés. Résultat : depuis 15 jours, les taux d’intérêt de la dette publique grecque ont flambé (à près de 9 % sur l’obligation à 10 ans) et la bourse d’Athènes s’est effondrée (- 20 % en quelques séances, du jamais vu depuis le krach de 1987…). Devant ce retour des incertitudes, les capitaux commencent à quitter la Grèce, ce qui menace la stabilité des banques : « la liquidité diminue, on se rapproche de dommages irréparables pour l'économie grecque », a mis en garde dimanche le gouverneur de la Banque de Grèce et ancien ministre des Finances, Yannis Stournaras.
Surtout, la perspective d’élections législatives anticipées fin janvier, 18 mois avant le terme normal de la législature, est devenue plus que probable, la majorité actuelle n’ayant pas le nombre de voix nécessaire pour faire élire un nouveau président de la République. Ce qui devrait amener au pouvoir la gauche radicale de Syriza, un épouvantail tant pour les autorités européennes que pour les marchés. Résultat : depuis 15 jours, les taux d’intérêt de la dette publique grecque ont flambé (à près de 9 % sur l’obligation à 10 ans) et la bourse d’Athènes s’est effondrée (- 20 % en quelques séances, du jamais vu depuis le krach de 1987…). Devant ce retour des incertitudes, les capitaux commencent à quitter la Grèce, ce qui menace la stabilité des banques : « la liquidité diminue, on se rapproche de dommages irréparables pour l'économie grecque », a mis en garde dimanche le gouverneur de la Banque de Grèce et ancien ministre des Finances, Yannis Stournaras.
« Pourtant, tout s’annonçait plutôt bien », explique un diplomate européen en poste à Athènes : « après
six ans de récession, 2014 s’achève avec une croissance de 0,6 % et on
attend 2,9 % en 2015, le plus fort taux de la zone euro. Le chômage a
connu une légère décrue et pour la deuxième année, il y aura un excédent
budgétaire de 3 % du PIB hors service de la dette !» Mais, Antonis
Samaras, le Premier ministre conservateur à la tête d’une coalition
avec les socialistes du PASOK, a multiplié les erreurs politiques depuis
l’été : « il a crié victoire trop vite en assurant dès cet été qu’à
la fin de l’année la Troïka, si honnie en Grèce, serait partie et que
le pays serait à nouveau maître de son destin », poursuit ce même diplomate. « Résultat : il a cru qu’il pouvait arrêter de faire des réformes et refaire de la politique locale comme avant ».
En
juin, au lendemain des élections européennes remportées par Syriza
(gauche radicale), devenu depuis 2012 le principal parti d’opposition,
Samaras a viré cinq ministres réformateurs (dont celui de la santé,
Adonis Georgianis, très apprécié des bailleurs internationaux pour son
professionnalisme) pour les remplacer par « des incompétents
populistes de la Nouvelle Démocratie dont le rôle principal est
d’occuper les plateaux de télévision pour tenir pièce à Syrisa »,
comme le dénonce un fonctionnaire européen en poste dans la capitale
grecque. Il ne s’arrête pas en si bon chemin et obtient le départ du
secrétaire général chargé des recettes fiscales, Harry Theoharis, un
poste théoriquement indépendant créé à la demande de la Troïka afin de
couper le cordon ombilical entre le fisc et les politiques. Celui-ci,
éduqué en Grande-Bretagne, n’a pas manqué de faire savoir à Athènes et
ailleurs, y compris sur Twitter,
qu’il avait été victime de Samaras qui n’avait pas apprécié qu’il
s’intéresse de trop près à ses amis… L’image de « réformateur » du
Premier ministre grec est sortie, suite à ce mouvement de personnel,
fortement écorné, tant auprès des autorités européennes que des marchés.
Surtout que, dans le même temps, Samaras a refusé les nouvelles mesures d’austérité exigées par la Troïka, même si ce n’est pas forcément à tort. « Les idéologues du FMI qui se montrent de plus en plus durs en exigeant toujours davantage de coupes dans le budget alors que ça n’est plus supportable par le peuple et qu’ils ne veulent pas comprendre qu’il n’y a plus de majorité politique au Parlement grec, la Vouli, pour les voter », s’énerve un fonctionnaire européen : « ils feraient mieux de se concentrer sur la réforme de l’appareil d’État au lieu d’exiger une réforme des retraites dans les cinq mois, ce qui est impossible pour n’importe quel pays, ou qu’on libéralise les licenciements collectifs alors que tout le monde a été licencié ! » « Il y a désormais une forte divergence sur le traitement de la Grèce entre d’un côté la Commission, de l’autre le FMI et la BCE », reconnaît une source de haut niveau.
Surtout que, dans le même temps, Samaras a refusé les nouvelles mesures d’austérité exigées par la Troïka, même si ce n’est pas forcément à tort. « Les idéologues du FMI qui se montrent de plus en plus durs en exigeant toujours davantage de coupes dans le budget alors que ça n’est plus supportable par le peuple et qu’ils ne veulent pas comprendre qu’il n’y a plus de majorité politique au Parlement grec, la Vouli, pour les voter », s’énerve un fonctionnaire européen : « ils feraient mieux de se concentrer sur la réforme de l’appareil d’État au lieu d’exiger une réforme des retraites dans les cinq mois, ce qui est impossible pour n’importe quel pays, ou qu’on libéralise les licenciements collectifs alors que tout le monde a été licencié ! » « Il y a désormais une forte divergence sur le traitement de la Grèce entre d’un côté la Commission, de l’autre le FMI et la BCE », reconnaît une source de haut niveau.
De fait, à
Bruxelles on a conscience que la dette grecque (détenue, pour les trois
quarts, par les Etats de la zone euro, la BCE et le Mécanisme européen
de stabilité) se situe à un niveau insupportable (177 % du PIB) et
qu’elle oblige la Grèce à « consacrer 5 % de son PIB au service de la dette », m’explique George Stathakis, donné comme futur ministre des Finances d’un gouvernement Syriza : « au maximum, on devrait y consacrer 2 %, un niveau que les marchés trouvent normal ».
Mais alléger la dette est plus simple à dire qu’à faire, compte tenu de
la rigidité de Berlin sur le sujet. Pierre Moscovici, le commissaire
européen aux affaires économiques et monétaires, qui s’est rendu lundi
et mardi à Athènes, estime néanmoins qu’il va falloir trouver une
solution pour sortir définitivement la Grèce de l’ornière tout en la
poussant à continuer les réformes. « Moscovici refuse de jouer les
demis de fermeture : il est là pour donner des signes d’ouverture et
essayer de trouver des solutions », dit-on dans son entourage. L’idée de la Commission serait que la Grèce s’engage d’elle-même sur un paquet de réformes, « ce qui serait moins intrusif que la Troïka », « centré sur la réforme de l’État ».
En échange, la zone euro s’engagerait à alléger la dette du pays au fur
et à mesure de leur mise en œuvre. Une sorte « d’haircut » par
consentement mutuel.
La première phase de ce programme a été mise en œuvre, le 5 mai, lorsque l’Eurogroupe a accepté un « agenda de croissance » présenté par le gouvernement grec en lui demandant, pour septembre, un « plan d’action »
doté de délais précis. Mais, et c’est sans doute l’erreur la plus grave
commise par Samaras, il n’a rien présenté, ni en septembre, ni en
octobre, ni en novembre, donnant le sentiment que « décidément, les Grecs sont incapables de tenir parole et, qu’une fois la Troïka partie, tout recommencerait comme avant », explique une source haut placée. Une analyse qu’ont immédiatement faite les marchés en se désengageant du marché grec : « le
bordel actuel a été créé par Samaras, peut-être intentionnellement afin
de savonner la planche de Syriza conscient qu’il devrait sans doute
convoquer des élections législatives anticipées pour le début de l’année
2015 ».[...]»
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