terça-feira, 27 de janeiro de 2015

Amour et sexualité. Quand les philosophes en parlent et la vivent

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«Vie sexuelle débridée, passions enflammées, abstinence voulue ou contrainte, déserts sentimentaux… Quel rapport à l’amour ont entretenu les grands philosophes occidentaux ? Quelle a été leur vie sexuelle ? Quelles que soient leurs idées, elles ne les ont guère aidés à se préserver des tourments de la passion et du sexe.

Montaigne

L’éloge de la luxure



Velu comme un singe et chauve comme un œuf, large et court sur pattes et plutôt petitement membré, Montaigne (1533-1592) n’avait pas le physique d’un Apollon. C’est ainsi qu’il se décrit sans complaisance dans le troisième livre des Essais. Mais il y confesse aussi son tempérament fougueux, son exceptionnelle carrière de séducteur et sa liste impressionnante de conquêtes lorsqu’il est jeune magistrat à Bordeaux : « Jamais homme n’eut ses approches plus impertinemment génitales », déclare-t-il, jusqu’à ce qu’à la cinquantaine, sa maladie de la gravelle (calculs rénaux) tiédisse ses ardeurs…


« Il faut jouir et jouir tant et plus de la vie », dira cet humaniste hédoniste qui donne force détails sur ses ébats et les qualités de ses maîtresses.


En bon disciple d’Épicure et de Lucrèce, Montaigne se méfie de l’amour : « Toute jouissance est bonne qui n’entame pas la liberté, l’indépendance, l’autonomie. »

Les maîtresses en ville, l’épouse au château, telle est la devise du séducteur qui ne s’occupera guère de sa femme, ni des six filles qu’elle a engendrées dont seule une a survécu (Montaigne n’en parlera jamais).


La seule véritable liaison sentimentale de Montaigne fut son profond amour pour Étienne de La Boétie, qui le laisse dévasté lorsque son ami meurt à 32 ans de dysenterie.

Emmanuel Kant, l’universitaire dandy


Pas de femme au logis, pas de maîtresses, pas de liaisons ancillaires ou homosexuelles connues… La vie sexuelle du penseur de Königsberg (1724-1804) est le trou noir de la philosophie.


Il serait pourtant erroné de le voir comme un ermite austère peu préoccupé de sa personne. Notre homme aime prendre ses déjeuners en compagnie d’amis brillants, ne crache pas sur le Médoc et sur les jeux de cartes… Attentif à son apparence, ses gilets et ses bas de soie sont soigneusement assortis, car Kant aime à charmer les belles dames ; cela ne l’empêche pas d’ailleurs d’affirmer dans ses écrits et en public une misogynie méprisante, considérant la femme comme « un animal retors », « peu capable de principes » et rarement dotée d’intelligence…


Quant au sexe, il inspire à Kant de la méfiance. Le désir charnel n’est que dévoration mutuelle et consumation mortelle. Pourtant, ce penseur majeur de la modernité naissante a aussi décrit un monde qui serait débarrassé d’Éros comme « un monde qui serait dangereusement abandonné par les Grâces » (Métaphysique des mœurs, 1785)… 

Friedrich Nietzsche

L’éternel éconduit



« Le christianisme a fait boire du poison à Éros : il n’en est pas mort mais il est devenu vicieux. » Pour Nietzsche (1844-1900), grand pionnier de la déconstruction de la philosophie classique, imprégnée de morale chrétienne et bourgeoise, la civilisation européenne s’est construite sur des instincts refoulés. L’amour, générateur absolu de toute créativité, trouve sa source dans la sensualité et la spiritualisation des instincts. À 38 ans, lors d’un séjour en Italie, il tombe fou amoureux de Lou Andreas-Salomé, alors âgée de 20 ans. Mais la belle intellectuelle, soucieuse de sa liberté, préfère cultiver avec lui une amitié intellectuelle, au grand dam du philosophe à qui elle inspirera certains passages de Ainsi parlait Zarathoustra (1883-1885). L’amoureux éconduit n’a jamais réussi à se marier tant ses tentatives de séduction étaient brutales et maladroites. En fait de sexualité, on ne lui connaît que quelques séjours au bordel où il attrapa probablement la syphilis qui lui occasionna, durant les dix dernières années de sa vie, une longue nuit de folie.

Arthur Schopenhauer

Le pourfendeur de l’amour



L’atrabilaire philosophe (1788-1860) est sans doute celui qui a le plus brillé dans sa haine des femmes et de l’amour. « Une série de gesticulations ridicules, accomplies par deux idiots… », écrit-il dans Le Monde comme volonté et comme représentation (1819). Il y présente les amants comme des marionnettes ahuries. Ce philosophe cynique, pour qui le seul véritable bonheur concevable serait de ne pas être né, montre une véritable haine de la vie. L’amour trouve sa racine dans l’instinct sexuel et ne vise que la reproduction. Rares seront ceux qui oseront aller aussi loin dans cette démolition ; pour lui, seul le sexe mâle est remarquable : « Les femmes sont par nature ennemies. » Ce célibataire hargneux et sarcastique qui déteste les humains a connu pourtant de nombreuses liaisons, mais renia toujours les enfants qu’il engendra.

Martin Heidegger et Hannah Arendt
La passion malgré ce que tout oppose



Lorsqu’ils se rencontrent en 1925, Hannah Arendt (1906-1975) est l’étudiante de Martin Heidegger (1889-1976). Elle a 18 ans, lui est marié et père de deux enfants. Cette liaison improbable et clandestine entre une apatride juive et celui qui se compromettra avec le nazisme fut passionnée. Mais Heidegger confiera qu’Arendt a contribué à l’élaboration de son œuvre. Celle qui va devenir une grande philosophe, émigrer aux États-Unis, se marier avec le philosophe allemand Heinrich Blücher avoue avoir toujours été sous l’emprise de l’auteur d’Être et Temps (1927). Leur relation fut chaotique et le plus souvent épistolaire, faite de longues discussions philosophiques. Heidegger refusera toujours de quitter le foyer familial, même s’il multiplia les liaisons avec ses étudiantes, jusqu’à ses 80 ans révolus. Pour un Heidegger qui pose les premières pierres de l’existentialisme, vivre ses amours incarne la liberté de l’être et la reconnaissance de l’existence de l’autre en laissant « être ce qui est ». Quant à Arendt, elle écrivit qu’il était l’homme à qui elle était restée « fidèle et infidèle, sans jamais cesser de l’aimer ».[...]»

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