terça-feira, 12 de maio de 2015

Edgar Morin et Patrick Singaïny, Avant, pendant après le 11 janvier

Avant, pendant, après le 11 janvier
«1Les attentats du 7, 8 et 9 janvier 2015 ont plongé la France dans la sidération. Un état de choc qui n’est pas propice à l’analyse. Edgar Morin et Patrick Singaïny tentent néanmoins de produire une réflexion visant à comprendre ce qui s’est passé. Ils s’efforcent également de proposer des pistes pour que cela n’arrive plus (même si le livre ne formule pas réellement de pistes concrètes). Le plan de l’ouvrage est conforme à son titre. Son objectif est en effet de réfléchir – rapidement – à trois « moments » qui font les trois parties du livre : Avant, pendant et après le 11 janvier.

  • 1 Edgar Morin et Patrick Singaïny, La France une et multiculturelle, Fayard, 2012.
2Il ne s’agit donc pas d’un ouvrage rédigé à quatre mains. Chaque auteur propose des contributions individuelles. Ainsi, dans un article de quelques pages – 7 exactement – qui constitue, à lui seul, la partie « Avant », Patrick Singaïny fait une mise au point : il ne sert plus à rien de convoquer dans le débat public une France d’hier largement mythifiée qui permettrait de distinguer « les faux et les vrais Français » (p. 16) ; la France existe toujours, elle « n’est pas morte », mais il existe désormais deux types de citoyens : ceux qui sont de « culture française » et ceux qui sont de « culture composite » (p. 17). Le programme des auteurs est connu : il s’agit de faire advenir une France une et multiculturelle1, ce qui n’est pas chose aisée, car comment le faire « dans une France confrontée à la mondialisation américaine et au communautarisme ? » (p. 19).

3La partie suivante s’ouvre directement sur le 7 janvier 2015, et deux articles très courts d’Edgar Morin et de Patrick Singaïny – 4 pages chacun – refont le constat d’une « France frappée au cœur » (François Hollande). Edgar Morin évoque bien son horreur et son écœurement face à l’attentat mené contre Charlie Hebdo. Des sentiments qui, cependant, ne doivent pas selon lui empêcher un travail de contextualisation. On aperçoit ici une version du « Oui, mais » dénoncé par les partisans stricts du droit au blasphème. Oui, cet attentat est « immonde » mais il faut tout de même tenir compte de ce que la France s’est lancée, au côté des États-Unis, dans des guerres au Moyen-Orient. Effet ricochet selon Morin : le Moyen-Orient s’est désormais invité en France au travers des attentats de Paris !

4Pour les deux auteurs, le seul moyen de sortir par le haut de cette « crise civilisationnelle » est de (re)construire une unité nationale « comprenant toutes ethnies, religions et compositions politiques » (p. 28).

5Dans la partie intitulée « L’appel du 11 janvier 215 », Edgar Morin cherche à comprendre l’attentat contre Charlie Hebdo. Les conditions de vie dans les banlieues, qui souffrent en effet d’une ghettoïsation croissante, sont alors mobilisées pour expliquer que de jeunes Français se convertissent au terrorisme islamiste. N’est-ce pas ici une façon de justifier le terrorisme ? Edgar Morin ne tombe-t-il pas dans un sociologisme particulièrement dangereux ? Tous les Français vivant dans les banlieues et qui sont de culture musulmane choisissent-ils le Jihad ? Plus encore, le poids de la colonisation encore présent, l’importance des discriminations font que des jeunes « d’ascendance immigrée » ne peuvent être de vrais Français ; privés de patrie, ils peuvent néanmoins devenir de vrais musulmans (p. 37). La France est-elle donc responsable de ce qui lui est arrivé ? Bien évidemment, le conflit israélo-palestinien est également convoqué : la France « privilégie l’Israël colonisateur au détriment du Palestinien colonisé », si bien que « la synagogue est respectée et honorée par les officiels qui y mettent kippa, la mosquée est oubliée » (p. 38). Oserions-nous avancer que le conflit israélo-palestinien est bien plus complexe ? Que ce sont bien des Français juifs qui sont tués en France aujourd’hui, ce qui peut aussi expliquer la mobilisation des politiques ? Et dire que les auteurs revendiquent en quatrième de couverture une approche en « nuance complexe ». Ils expliquent aussi qu’« il ne suffit plus d’être indigné ». Oui, prenons-les aux mots : il ne suffit plus de s’indigner des inégalités croissantes – bien que réelles – en France et des conflits dans le monde pour comprendre les attentats du 7, 8 et 9 janvier 2015.

6Pour Patrick Singaïny, la France est entrée dans une troisième guerre mondiale. Dans le cadre d’une lettre ouverte, il choisit de s’adresser directement à François Hollande pour lui demander de rassembler toutes les composantes de la Nation d’aujourd’hui ; pour garantir la sécurité des citoyens de confession juive « mais, tout aussi urgemment, il faut venir en aide aux citoyens de confession musulmane » (p. 50) ; et, enfin, pour répandre les valeurs des Lumières chez tous les citoyens de France grâce à l’école.[...]»

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