terça-feira, 5 de maio de 2015

Le paradigme monétaire du XXI siècle

«Ce nouveau contexte offre un avantage décisif aux Etats dans leur gestion du surendettement : le temps.

monnaie


Depuis une quinzaine d’années la création monétaire a été très active, non seulement en Europe mais aussi dans le reste du monde, avec une tendance à l’accélération au cours des dernières années. En zone euro par exemple, le rapport de la masse monétaire au P.I.B. (qui donne la mesure inversée de la vitesse de circulation de la monnaie, a bondi de moitié entre 2000 et 2008 sous l’effet d’une politique monétaire très accommodante luttant contre une crise financière systémique. Dans l’ensemble du monde la hausse a été plus régulière mais presque aussi forte au total. La grande abondance de liquidité est donc un fait indiscutable, mais faut-il pour autant en conclure à un excès qui pourrait être dangereux s’il venait à être corrigé pour un retour en arrière brutal ? Celui-ci serait synonyme de forte relance de l’inflation, de hausse violente des taux d’intérêts et donc de crise financière majeure. Le risque à éviter est bien celui de la réversibilité du mouvement.

Jusqu’ici, l’afflux de liquidité de ces dernières années est resté sans effet sur le niveau des prix car la liaison entre quantité de monnaie et inflation s’exerce par l’intermédiaire d’un troisième élément : la vitesse de circulation de la monnaie. Or il se trouve que depuis le début du siècle la vitesse de circulation a enregistré dans le monde, et notamment dans la zone euro, une très forte baisse annulant l’effet inflationniste du surplus de liquidité.
“ L’état d’esprit de toute une société dans des domaines tels que les prix, les salaires, la liquidité monétaire, l’épargne, l’endettement etc. constitue un tissu de relations relativement stables dans le temps, une sorte de logiciel monétaire qui s’impose pour une période pouvant atteindre plusieurs générations”

L’expérience constante du siècle précédent qui avait été érigée en principe par beaucoup d’économistes et de banques centrales est qu’il existe une tendance naturelle de la vitesse de circulation à revenir à son niveau habituel en déclenchant une hausse des prix. L’application systématique de ce schéma classique amène logiquement à proscrire toute augmentation marquée de la création monétaire. Une telle vision est encore largement répandue en Allemagne ce qui explique la position rigoureuse de la Bundesbank en la matière. Or ce raisonnement, apparemment convaincant au regard du passé, recèle une faille qui apparaît lorsqu’on prend suffisamment de recul dans le temps.

On voit alors que sur très longue période, l’évolution monétaire s’inscrit dans un tableau très général caractérisé par un certain paradigme qui traduit l’ensemble des réactions des agents économiques devant le phénomène monétaire. L’état d’esprit de toute une société dans des domaines tels que les prix, les salaires, la liquidité monétaire, l’épargne, l’endettement etc. constitue un tissu de relations relativement stables dans le temps, une sorte de logiciel monétaire qui s’impose pour une période pouvant atteindre plusieurs générations. Or de loin en loin on voit changer cette toile de fond : un nouveau paradigme vient alors marquer une nouvelle époque.

Nouvelle époque, nouveau paradigme


Ainsi la tendance naturelle de l’économie, après une fin du XVIIIème siècle particulièrement troublée, est revenue pendant tout le XIXème à une grande stabilité sous le régime de l’étalon-or et cela jusqu’à la Première Guerre Mondiale. Après celle-ci débute une longue période généralement inflationniste (à la seule exception de la grande crise des années trente), tendance encore fortement accrue après la Deuxième Guerre Mondiale. Or bien des indices montrent aujourd’hui qu’une nouvelle époque aux caractères profondément différents est en train d’émerger depuis le début du siècle présent. Contrairement aux différents cycles de longueur variable qui affectent l’économie avec une certaine régularité, une fois de plus, c’est par un choc exogène que s’effectue le changement de tableau : après la remise en ordre monétaire du premier empire, puis l’arrivée d’un siècle inflationniste à la suite des deux Guerres Mondiales c’est sans doute le trouble profond apporté à l’économie par le tsunami de la globalisation qui semble marquer une nouvelle époque de l’histoire économique associée à un fonctionnement différent de l’appareil monétaire.

L’hibernation des prix et des salaires dans les pays développés en dépit des efforts des autorités monétaires ainsi que le freinage général de la croissance potentielle à long terme modifie profondément le paysage économique et l’on voit réapparaître à certains moments des craintes de déflation difficilement conjurées par d’énergiques interventions. Le paradigme monétaire associé à une telle situation s’en trouve évidement modifié de sorte que la pente naturelle vers l’inflation a pratiquement disparu dans les pays développés.
“Bien des indices convergents montrent, semble-t-il, que nous soyons probablement entrés avec le XXIème siècle dans une longue période de relatif refroidissement économique, correspondant notamment à un effort de désendettement”

La cohérence du système est assurée par la baisse de la vitesse de circulation de la monnaie. Bien des indices convergents montrent, semble-t-il, que nous soyons probablement entrés avec le XXIème siècle dans une longue période de relatif refroidissement économique, correspondant notamment à un effort de désendettement. Au plan monétaire, on peut penser que la très forte baisse de la vitesse de circulation de la monnaie, loin d’être une anomalie temporaire, se révélera une réalité durable.

On prendra alors l’habitude de vivre avec des actifs monétaires d’autant plus abondants que la lutte contre la menace de déflation continuera d’alimenter la création de monnaie. La probabilité de voir s’établir pour longtemps un tel tableau puise sa source dans le caractère durable des raisons qui expliquent ce changement de paradigme. La globalisation, après une forte accélération depuis une trentaine d’années est bien loin encore d’avoir produit tous ses effets sur la concurrence. Celle-ci continuera sans doute longtemps d’exercer une pression sur les économies anciennement développées, du fait des frottements inévitables dans un appareil économique en mutation qui s’accompagne nécessairement de chômage et pèse sur les salaires et les prix. Non seulement il reste à développer des pans immenses de la planète mais en outre, passé le premier stade de la mise en valeur des pays neufs, leur concurrence affichera progressivement une montée en gamme qui la rendra d’autant plus sévère sur les vieux pays industrialisés.

Des avantages certains sur le plan financier pour les Etats


La nouvelle page qui s’est ouverte au début de ce siècle dans l’histoire du développement économique et le logiciel monétaire qui lui est associé donnent à première vue une image plutôt grise : celle d’un monde appliqué à réduire ses déséquilibre au prix d’une croissance ralentie et cela dans le cadre de relations monétaires nouvelles. Certes la perspective d’un chemin plus difficile vers la croissance, surtout dans les pays les plus anciennement développés comme en Europe, n’est guère enthousiasmante mais il faut sans doute se garder d’un jugement trop négatif. D’abord, dans le domaine de l’économie réelle, un progrès moindre peut être encore substantiel comme le démontrent les États-Unis, pourvu que soient faites les réformes de structure qui s’imposent.

De plus, au plan financier, les traits nouveaux de l’appareil monétaire présentent certains avantages. On a vu plus haut que les changements intervenus dans le tissu des relations entre paramètres monétaires donnent plus de latitude dans le jeu de la liquidité, et renforçent ainsi les moyens d’action des banques centrales puisque l’on voit s’éloigner des risques d’accident comme l’éclatement de bulles de liquidité. D’autre part la nouvelle configuration de l’appareil monétaire, en promettant une très longue période de taux d’intérêts très bas pourrait permettre d’aborder dans de meilleures conditions le problème explosif du surendettement souverain, notamment dans une partie de la zone euro.

“La nouvelle configuration de l’appareil monétaire, en promettant une très longue période de taux d’intérêts très bas pourrait permettre d’aborder dans de meilleures conditions le problème explosif du surendettement souverain”

Pour apprécier pleinement l’avantage décisif que constitue dans la gestion du surendettement un niveau très bas des taux, il est bon de rappeler que l’expression couramment employée de "remboursement de la dette" est trompeuse et ne correspond à aucune réalité. Le remboursement de tout ou partie de l’ensemble de la dette d’un État ne s’est jamais produit et constitue d’ailleurs en soi un non-sens économique puisqu’il exercerait un puissant effet déflationniste. Ce qui est remboursé en situation normale ce sont des emprunts particuliers mais l’opération est immédiatement couverte par un refinancement sur le marché. Maîtriser une dette ne signifie pas la rembourser mais en servir facilement les intérêts ce qui, inspirant confiance, assure un refinancement aisé des échéances sur le marché. Le niveau des taux est donc un paramètre essentiel dans le cas de surendettement.[...]»

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