quinta-feira, 30 de abril de 2015

L'amour fait mal, oui, mais pourquoi ?


 
«En 1977, Roland Barthes déplorait l’absence de discours théorique venant soutenir le discours amoureux, et dénonçait son statut de sans domicile fixe des sciences humaines . Le langage de la science serait inapte à rendre compte du phénomène, et le seul discours amoureux possible serait celui de la subjectivité pure, c’est à dire celui de la création littéraire . Eva Illouz prend le contrepied de cette position et analyse nos rapports amoureux à l’aune des mutations de la modernité, et, au premier chef, de la montée en puissance de l’individu. Mettant à profit son parcours interdisciplinaire – elle a étudié la littérature, la sociologie, elle a également été la directrice de la très prestigieuse école des Beaux-Arts Bezalel – elle nous montre que le cœur obéit lui aussi à une rationalité, contrairement au fameux adage. Il suffit d’y être assez attentif pour en découvrir les règles. Mais les termes qui structurent cette rationalité du choix amoureux ont changé, car le marché matrimonial s’est dérégulé. C’est ce que cette professeure de sociologie à l’université hébraïque de Jérusalem se propose d’explorer dans ce livre.

La première partie de l’ouvrage est consacrée à une analyse historique, construite sur un corpus hétéroclite. Sa richesse tient aux choix des sources, populaires, comme les magazines féminins, et littéraires, comme les romans de Jane Austen. Elles sont complétées par des témoignages : des lettres de femmes du XIXe, des entretiens avec des femmes d’aujourd’hui. Cette manière unique de croiser les regards permet de rendre toute sa densité au sujet traité. L’intention est de mettre à jour les topoi de l’époque précédente, qui vont servir de base à la démonstration d’Eva Illouz : alors que notre manière de concevoir et de rêver l’amour n’a pas changé, la structure sociale et économique qui régit les relations amoureuses elle, s’est considérablement modifiée. Comment ces changements sociaux économiques affectent notre manière d’aimer ?


Ce changement se traduit par une mutation dans l’architecture du choix. Loin d’être un choix purement individuel, les choix amoureux reflètent au XIXe siècle un équilibre entre des préférences familiales, professionnelles et individuelles. En conséquence, il s’agit de mettre en avant la conformité avec un ordre social. La souffrance amoureuse est donc considérée positivement, comme une épreuve visant à tester ce qu’Eva Illouz appelle le « caractère », c’est à dire la capacité de l’individu à faire passer des intérêts sociaux avant ses intérêts individuels. A l’inverse, le choix amoureux est aujourd’hui ouvert, il ne tire sa légitimité que des préférences individuelles singulières. Parce que le choix amoureux doit être l’expression de la plus profonde intimité d’un individu, le rejet amoureux est vécu d’abord comme un rejet de sa propre personne, et non d’une situation économique ou sociale extérieure.

 
L’individu est désormais seul maitre et juge de ses choix amoureux. Cette individualisation du choix fait passer la décision amoureuse d’une justification objective (le partenaire a une bonne position, vient d’une bonne famille) à une justification ancrée dans la subjectivité (je l’aime). Mais cette subjectivation du choix amoureux ne veut pas dire simplification. Eva Illouz le souligne : « la faculté de choix, loin d’être fondée sur une affectivité pure, requiert dans les faits un discours affectif et cognitif complexe pour évaluer les partenaires, pour s’autoconsulter sur ce que l’on ressent, et prévoir sa propre capacité à soutenir ces émotions. »  Face à l’inculpation de la responsabilité individuelle et le recours à des schémas psychologiques pour expliquer l’échec amoureux, Eva Illouz rappelle le rôle des contraintes sociales qui pèsent sur l’individu.

 
Quels sont dès lors les critères du choix amoureux moderne ?

1- Le choix amoureux repose d’abord sur l’évaluation des partenaires potentiels. Or, du fait de l’élargissement considérable des options possibles, le sujet éprouve une impression d’abondance réelle ou imaginée des partenaires, liée à l’effondrement des structures traditionnelles qui orientaient le choix : la religion, le statut social, etc. La capacité à fixer son amour sur un objet unique est alors entravée.
2- Le choix amoureux moderne est un plébiscite de tous les jours qui doit être validé par la production constante de sentiments. Cette évaluation permanente de ses propres sentiments s’effectue à travers l’introspection. Eva Illouz rejoint ici les analyses du souci de soi, d’abord mis en lumière par Foucault . Le souci de soi correspond à un travail entrepris sur soi-même pour régler son rapport à l’autre à sa propre subjectivité. Cet examen rationnel de ses sentiments encourage un mode essentialiste de la prise de décision : elle n’est plus le fruit d’une adaptation à un contexte mais l’expression de l’essence de l’individu.

3- Cette introspection inquiète et constante conduit à sans cesse opposer contrôle de soi et émotion spontanée. Ainsi, le choix amoureux opère des allers et retours entre ces deux pôles.

 
Cette dérégulation du choix amoureux, qui s’exprime par la disparition de critères objectifs, s’imposant à l’individu, conduit à rapprocher choix amoureux et choix de consommation. « Pour la raison précise qu’ils se caractérisent par une dérégulation des mécanismes du choix, les marchés matrimoniaux créent des formes de choix de plus en plus similaires à celles qui ont cours sur les marchés de consommation. Le choix du consommateur est une catégorie culturellement spécifique du choix, exercé à travers une combinaison délibération rationnelle, de raffinement du goût et de désir de maximiser utilité et bien être. »

Cette analyse montre la porosité entre les logiques de marché et notre manière d’interagir avec autrui. Dans la lignée des travaux ouverts par Michael Sandel , Eva Illouz montre que le domaine de l’amour, pourtant supposé a-économique, témoigne du passage d’une économie de marché à une société de marché.

Deux tendances au cœur des mutations du capitalisme trouvent également leur expression dans le discours amoureux : les techniques de rationalisation (dont l’application de rencontres en ligne Tinder est un bel exemple) et l’importance prise par les émotions fictionnelles, c’est à dire les émotions ressenties par anticipation, qui reposent largement sur les capacités d’imagination du sujet. La part croissante de ces projections dans des rêves de bonheur amoureux dès le premier rendez-vous s’explique par leur sollicitation constante par la publicité.


Un féminisme renouvelé ? La question de l’inégalité de genre dans l’expérience amoureuse

Cette nouvelle architecture du choix conduit à renforcer la compétitivité du marché amoureux. Or, cette compétition amoureuse n’affecte pas de la même manière les hommes et les femmes : elle se traduit par une « phobie de l’engagement » qui s’exprime de manière genrée, touchant principalement la gent masculine. Ce sont les hommes qui sur le plan économique bénéficient le plus de la situation maritale. Les femmes souffrent donc d’une situation paradoxale : elles ont moins d’intérêt que les hommes à se marier, et pourtant, elles reçoivent plus d’injonctions sociales.
Ainsi, le livre d’Eva Illouz ouvre une nouvelle voie au féminisme moderne. Loin des débats essentialistes sur le féminisme, Eva Illouz a le mérite de proposer une alternative, sur un ton pragmatique . Une partie des souffrances amoureuses des femmes s’explique non pas par leur incapacité affective ou par des traumatismes d’ordre psychologique, mais par une structure économique et sociale.

Cette lecture comporte toutefois le risque de tomber dans un discours réificateur : essentiellement destiné aux femmes, il peut être interprété comme enfermant les individus dans des identités de genre, ce que des penseurs comme Judith Butler, grâce à la notion de queer, cherchaient à éviter.[...]»

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Vu d'en haut Pascal Chevalier, Reworld Media : "Le support de diffusion papier est en crise, les medias de contenus vont au contraire très bien."

La stratégie, vue par son fondateur, d'un groupe qui se veut l'illustration de la presse de demain

pascal chevalier

«Pascal Chevalier revient à peine d’une visite des bureaux du groupe à Barcelone. L’occasion d’un séminaire dans la capitale catalane. “En tant qu’actionnaire et patron, c’est aussi mon rôle de réunir les équipes pour faire le point sur la stratégie et les objectifs. Autant faire ça dans un endroit sympa et dans la bonne humeur.” D’emblée, l’homme détonne. Dans les murs de Reworld Media à Boulogne-Billancourt, à quelques encablures des locaux de TBWA, Pascal Chevalier n’a apparemment pas la même vision du secteur de la presse que la plupart des observateurs. L’entrepreneur du digital est tout en confiance sur l’avenir.

À coups d’acquisition, le quadra a bâti un groupe de presse significatif épaulé par l’expérimenté homme de média Gauthier Normand. Leur objectif ? Dépoussiérer des marques médias –comme la vénérable Marie-France, Be ou Auto-Moto, rachetées au groupe Lagardère – et transformer leur notoriété en valeur économique. Et pourquoi pas ? Encore en phase d’investissement, le groupe n’entend pas s’arrêter là. “Dans les 2 ou 3 ans, le paysage des groupes du secteur aura dès lors complètement changé.” Une évidence. La question : avec ou sans Reworld Media ?

Reworld Media est un groupe média qui résulte d’un “build-up” de titres. Depuis 2012, nous avons racheté diverses marques média : Marie France, Be, AutoMoto etc. À ce jour, Reworld Media est composé de 15 marques déclinées sur l’ensemble des leviers de diffusion, en France et à l’international. La dernière acquisition est un peu différente. En mars dernier, nous sommes devenus le premier actionnaire du spécialiste du marketing Tradedoubler. Notre périmètre change, car Tradedoubler réalise 180 millions d’euros de chiffre d’affaires à comparer à nos propres 66 millions d’euros. Nous avons repris ce groupe il y a trois ans avec une vraie logique, à la fois industrielle et entrepreneuriale. On a réussi à donner un peu de jeunesse et une certaine dynamique dans un marché des médias qui, finalement, va très bien.

Le positionnement

Notre vision est qu’un groupe de média se construit désormais autour de la data et de sa capacité à diffuser le bon message – information ou communication – sur le bon support, à la bonne personne et au meilleur moment. L’enjeu est donc de connaître le lecteur et lui adresser l’information dont il a besoin.

Premièrement, notre groupe crée de l’information de qualité pour un lecteur, la relation de confiance reposant sur la qualité des contenus proposés. Deuxièmement, notre groupe est aussi marchand, par la régie qui vend de la publicité à des annonceurs. Nous visons ainsi deux cibles : le consommateur et le lecteur. Nous gérons à peu près 55 millions de points de contact par mois. Cela comprend nos utilisateurs, qui sont un peu plus de 10 millions, les visiteurs uniques des sites, autour de 4 millions par mois, les téléchargements de nos applications mobiles, autour de 2 millions, et les inscrits sur les réseaux sociaux, avec par exemple 700 000 pour Facebook.

“Notre vision est qu’un groupe de média se construit désormais autour de la data et de sa capacité à diffuser le bon message – information ou communication – sur le bon support, à la bonne personne et au meilleur moment”

À ces indicateurs s’ajoutent les 10 millions de lecteurs de nos magazines et les personnes exposées à tous nos produits vendus dans les caisses des supermarchés de France, autour de 20 millions. Nous sommes un nouvel acteur dont l’objectif est de construire un groupe média leader dans divers univers de marques : le féminin, le life style et le divertissement. Les groupes média ont subi Internet. La plupart sont encore dans une logique où ils poussent sur Internet du contenu issu du print sans vraiment le changer. Idem pour la pub : ils dupliquent les modèles de régies sur papier sur le Web. Avant, ils vendaient de la page, maintenant ils vendent du bandeau. Ça ne peut pas marcher. Pourquoi ? Parce qu’Internet est avant tout un univers de performance. Le vrai concurrent publicitaire des médias, c’est aujourd’hui Google.

La stratégie

Avant de restructurer, nous procédons à une diversification. Par exemple avec ‘Marie France’ en 2013 : la marque n’avait pas de site Internet et ne faisait rien dans le digital. L’équipe rédactionnelle était plutôt partante. La régie publicitaire aussi. La première chose que l’on a faite a donc été de lancer un site avec notre méthode d’entrepreneur digital. C’est-à-dire très rapidement. En trois semaines, un site Web est né. Ce n’était pas parfait mais il y avait quelque chose. Nous avons vite formé les équipes. Tout cela a permis de créer des premières audiences et de constituer les premières bases de données. La restructuration se fait après.

“Concernant les personnels, ceux qui avaient envie de faire la révolution digitale sont restés. Les autres sont partis. Tout simplement”

Elle passe par des renégociations d’accords, comme sur le coût du papier. Concernant les personnels, ceux qui avaient envie de faire la révolution digitale sont restés. Les autres sont partis. Tout simplement. Je considère les activités de ce secteur comme un business. Je vois plutôt les opportunités, pas le déclin. Dans les médias, tout le monde me dit qu’il faut restructurer, ce à quoi je réponds qu’il faut d’abord investir.

Le modèle économique

Notre modèle économique repose sur la monétisation d’un contenu et d’une audience de qualité. C’est la définition de base d’un groupe média. Il ne faut pas trahir ce modèle. Le contenu est clé, et vous ne verrez jamais chez nous de forum qui ne crée pas de la vraie audience qualifiée. Nous sommes en auto-financement. Nous avons levé un peu moins de 10 millions d’euros en Bourse. Des fonds d’investissement nous accompagnent, notamment Idinvest, très présent dans le domaine de la technologie, et le fonds singapourien Hera Capital. Intéressant car ils ont un réseau en Asie pour nous aider sur le développement local. Dans l’immédiat, nous n’avons pas besoin d’argent. Je suis un épicier : je gagne de l’argent et je réfléchis après.

“Le contenu est clé, et vous ne verrez jamais chez nous de forum qui ne crée pas de la vraie audience qualifiée.”

Nous avons une capacité à récupérer les fonds significatifs, la société a les moyens de faire des acquisitions. Ce n’est même plus une histoire d’argent mais c’est une histoire de temps et de priorité. Aujourd’hui, il est plus facile de déployer une marque à l’international que d’aller racheter une énième société en France. Gérer de la croissance est plus aisé que gérer de la restructuration. En France, nous regardons quand même des dossiers en presse, Internet, radio. Notre enjeu est de continuer à innover et à surprendre sur le marché en prenant des risques. Nous restons attachés au levier international. Nous croyons beaucoup à l’événementiel premium. Côté contenu, la vidéo est vraiment le support de demain. Nous investissons massivement. Nous ne lancerons pas pour autant une chaîne de télévision. Nos sites et le mobile demeurent les principaux supports de diffusion.

Les journalistes

Pour faire un produit de qualité, il faut avoir des gens compétents, capable d’écrire du contenu dans des formats différents. Le métier de journaliste évolue dans la façon de produire du contenu et de le mettre en avant. Il est nécessaire d’avoir une population de journalistes multisupports. Nos équipes font du média à la fois digital et print. Ensuite, les journalistes dans le groupe ont un centre de compétence transversal aux marques.

“Nos équipes font du média à la fois digital et print. Ensuite, les journalistes dans le groupe ont un centre de compétence transversal aux marques”

Par exemple, il y a une personne spécialiste de la beauté mais pour tous les supports. Le métier consiste à se mettre en scène sur les réseaux sociaux Twitter, Facebook etc. Ensuite, il y a l’écriture des articles, la gestion des newsletters, et toutes les interactions avec les lecteurs. Le sujet le plus apprécié sera publié dans le magazine du mois. La chaîne de production des articles a complètement changé. Cela nécessite de former et d’apporter des outils de travail digitaux. C’est un an de travail. Nos rédactions sont organisées en pôles de compétences. Chaque journaliste manage par ailleurs des pigistes, des experts et des contributeurs extérieurs.

La régie publicitaire

Elle est organisée par univers de marques : le féminin, le life style et le divertissement. Nos équipes proposent aux annonceurs des dispositifs centrés sur une marque qui correspond à une cible de lectorat, ou alors qui sont centrés sur une cible plus large présente sur l’ensemble des marques. Nous sommes une régie multisupports qui propose du “cousu main” à l’annonceur. C’est finalement une approche orientée “opération spéciale”.

C’est la publicité par habillage de sites Web qui fonctionne le mieux. Les internautes viennent sur nos sites pour des informations. La publicité autour du contenu est très efficace. La régie va trouver un annonceur qui est cohérent avec l’écriture, et non pas l’inverse. Pas de publireportage, mais de la publicité premium. Tous les annonceurs voulant faire passer des valeurs de marque apprécient ces dispositifs.

“Nous ne sommes pas là pour concurrencer Carrefour, nous sommes des dénicheurs de tendances.”

Il y a aussi une partie performance pour les annonceurs voulant utiliser un espace comme la publicité avant ou après une vidéo.

Enfin, il y a toute la partie e-commerce. Nous n’avons pas de site de vente, ni de logistique. C’est un autre métier, et nous, nous faisons du contenu. Nous sommes éventuellement prescripteurs de bons produits à travers certains articles. Nous proposons le concept de la box : contre une trentaine d’euros par mois, nous nous engageons à livrer en plus du magazine, un sac de produits sélectionnés par le pôle publishing. Avec ‘Marie-France’, le “bag” contient un produit de beauté, un accessoire de mode, un livre, un produit de cuisine… ‘Be’ et ‘Gourmand’ proposent aussi des coffrets. On parle de “content commerce”. Nous réalisons 1 million d’euros par an de chiffre d’affaires. Nous ne sommes pas là pour concurrencer Carrefour, nous sommes des dénicheurs de tendances.

La presse magazine

Pour ceux qui s’appellent encore presse magazine, c’est la catastrophe. Ils ne devraient plus s’appeler presse mais média. La presse (papier) n’est plus qu’un support parmi d’autres. Penser de cette façon résout le problème numéro 1 de cette industrie : la baisse de la diffusion, et donc les surcoûts liés au prix du papier. Imprimer des journaux va devenir de plus en plus insupportable. Cela n’a rien à voir avec la qualité des contenus. Les usages changent et les gens, en particulier les jeunes, lisent de moins en moins de journaux et magazines papiers.

“Le support de diffusion papier est en crise, les medias de contenus vont au contraire très bien”

C’est comme ça. La presse doit faire face à une crise de diffusion. Le support de diffusion papier est en crise, les medias de contenus vont au contraire très bien. Les groupes de presse doivent investir aux bons endroits. Investir sur le papier n’est pas dans le sens de l’histoire. Mais pour beaucoup d’anciens éditeurs, il est difficile de se remettre en cause.

La presse d’information politique et générale

Cette presse est confrontée à deux problématiques. Primo, le marché de la “news” a basculé sur Internet. Les informations sont disponibles gratuitement. Même parcellaires, ces contenus suffisent à une énorme partie de la population. Sur ce marché, il y a une prime à la taille et à l’investissement. BFM fait remarquablement le travail. Je pense qu’il n’y a plus beaucoup de place pour d’autres acteurs, surtout sur Internet.

“Il y a un vrai marché sur le traitement en profondeur de sujets politiques et économiques. Il existe un lectorat prêt à payer et des annonceurs prêts à investir dans des médias éco-business qui décryptent des sujets à la fois en profondeur et dans la durée”

En revanche, il y a un vrai marché sur le traitement en profondeur de sujets politiques et économiques. Il existe un lectorat prêt à payer et des annonceurs prêts à investir dans des médias éco-business qui décryptent des sujets à la fois en profondeur et dans la durée. On est dans un modèle de média leader d’opinion qui développe de multiples micro-audiences sur des sujets pointus. Pour intéresser les publics, il faut investir dans les rédactions et produire du contenu de qualité, investir dans des commerciaux et des produits publicitaires innovants, et enfin investir dans la technologie pour créer de l’audience et de la valeur grâce à la data.

La consolidation des médias

En France, nous sommes entrés dans un cycle de changement d’actionnaires. Il y a beaucoup de groupes familiaux, avec certains qui s’intéressent au sujet et d’autres qui veulent vendre. Ce manque de visibilité d’actionnaires forts dans les groupes de média, dans un secteur en mutation, crée de l’instabilité. Il faut arrêter de se plaindre : en tant qu’actionnaire et patron, mon rôle est aussi de donner l’envie de faire. Cette crise de l’actionnariat familial historique crée des opportunités pour des nouveaux entrants. Aujourd’hui dans la presse, tout est à vendre !

“Aujourd’hui dans la presse, tout est à vendre ! Les groupes où il n’y a pas de relève actionnariale, pas de vision de la direction et pas de cohérence dans le management, seront vendus dans les 2 ou 3 ans”

Les groupes où il n’y a pas de relève actionnariale, pas de vision de la direction et pas de cohérence dans le management, seront vendus dans les 2 ou 3 ans. Le paysage des groupes média aura dès lors complètement changé.[...]»

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quarta-feira, 29 de abril de 2015

Lima et après ?


 
«Au lendemain de la Conférence de Lima sur le climat, les résultats de la coopération internationale en matière d’environnement sont décevants. Les États-Unis et la Chine étant peu disposés à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre avant 2030, les perspectives futures, et notamment la Conférence de Paris en décembre 2015, ne sont guère plus réconfortantes.

« Tout écroulement porte en soi des désordres intellectuels et moraux. Il faut créer des hommes sobres, patients qui ne se désespèrent pas devant les pires horreurs et ne s’exaltent pas pour chaque ânerie. Pessimisme de l’intelligence, optimisme de la volonté ». Antonio Gramsci, Cahier de prison n° 28.

L’année 2014 a connu une actualité climatique intense. Parmi les nombreux événements institutionnels en relation avec le sujet on citera la remise du cinquième rapport du GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) [1] qui semble avoir, pour une fois, laissé sans voix les « climato-sceptiques », le sommet extraordinaire de l’ONU sur le climat qui s’est tenu à New York le 23 septembre et a réuni plus de 120 chefs d’État, l’annonce sino-américaine sur le climat effectuée le 12 novembre en marge du sommet de l’APEC (Asia-Pacific Economic Cooperation) et, enfin, la Conférence de Lima qui s’est tenue du 1er au 14 décembre. Quels enseignements tirer de ces événements ? Et en particulier des deux derniers présentés comme devant contribuer à l’édification du futur régime climatique mondial censé voir le jour lors de la COP 21 [2] qui va se tenir à Paris à la fin de l’année.

Répondre à cette question exige de s’abstraire de l’actualité immédiate afin de replacer ces événements dans une certaine profondeur historique. En effet, en matière de lutte contre le changement climatique, l’enjeu central réside, depuis le début des négociations au seuil des années 1990, à trouver une règle acceptable de répartition du poids financier des décisions destinées à réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) et à s’adapter à la hausse des températures en cours. Depuis 1992 – année de l’ouverture à la signature de la Convention-cadre des Nations unies sur le changement climatique (CCNUCC) – les négociations climatiques entrecroisent des questions de justice internationale (quels critères de répartition adopter entre pays ?) et de realpolitik (comment chaque pays tente de faire peser sur les autres la plus grande part possible du fardeau ?). Dit autrement, comment diviser le poids du fardeau entre les pays riches et les pays pauvres ainsi qu’entre la génération présente et les générations futures ? Et comme si cette question n’était pas suffisamment compliquée, il faut y intégrer le fait que certains pays pauvres d’hier – la Chine par exemple – sont devenus des nations riches tandis que d’autres – comme l’Inde – sont en passe de le devenir.

Régime climatique, responsabilités passées et… futures

Le régime climatique actuel se compose de deux textes : la Convention-cadre des Nation unies sur le changement climatique (CCNUCC) de 1992 et le Protocole de Kyoto de 1997. Le premier texte, entré en application en mars 1994, vise à « stabiliser […] les concentrations de gaz à effet de serre dans l’atmosphère à un niveau qui empêche toute perturbation anthropique dangereuse du système climatique » (art. 2). Les parties à la Convention, « tenant compte de leurs responsabilités communes mais différenciées » (art. 4) s’engagent – en particulier les pays classés dans l’ « Annexe I » (pour faire vite les pays industrialisés, voir encadré) – à mettre en œuvre un certain nombre de mesures (non contraignantes). Le Protocole de Kyoto, quant à lui, qui est entré en application en 2005, avait pour principal objectif de parvenir à ce que les émissions de GES des pays industrialisés (dont la liste est établie dans l’ « Annexe B », voir encadré) réduisent, pour 2012, d’un peu plus de 5% leurs émissions de GES par rapport à leurs niveaux de 1990. Cet objectif a été très largement atteint et, en attendant l’adoption d’un nouveau cadre institutionnel, les participants à la Conférence de Doha (COP 18) de 2012 ont décidé de prolonger le Protocole de Kyoto jusqu’au 31 décembre 2020.

Le régime climatique mondial

Dans le cadre de la Convention-cadre des Nation unies sur le Changement climatique (CCNUCC) de 1992 et du Protocole de Kyoto de 1997, les pays sont classés dans des « Annexes » selon une terminologie qui peut sembler passablement confuse : pays de l’Annexe I, de l’Annexe II, de l’Annexe B ou encore pays « non-Annexe I ».
L’Annexe I est relative à la CCNUCC. Elle regroupe les pays industrialisés membres de l’OCDE en 1992 plus les pays en transition (Annexe I EIT pour Economies in Transition) tels que la Fédération de Russie, les États baltes et un certain nombre de pays d’Europe centrale et orientale. Les pays « non-Annexe I » sont des pays en développement. La Chine est un pays « non-Annexe I ». Quant à l’Annexe II, elle regroupe les membres de l’OCDE de l’Annexe I mais pas ceux de l’Annexe I EIT. Les pays de l’Annexe II doivent aider les pays en développement à mettre en œuvre des programmes de réduction d’émissions et leur transférer, ainsi qu’aux pays EIT, des technologies vertes.
L’Annexe B, quant à elle, est relative au Protocole de Kyoto. Elle regroupe les pays de l’Annexe I qui sont tenus à des engagements chiffrés de limitation ou de réduction des émissions de gaz à effet de serre.
Dans la pratique, même s’il existe quelques différences, de nombreux observateurs utilisent indifféremment Annexe I et Annexe B.

Le Protocole de Kyoto est un compromis par nature temporaire en termes d’objectif de réduction d’émissions de GES (-5%), de pays concernés par les obligations de réduction (Annexe B) et par les instruments mobilisés (permis d’émissions…). En effet, il faudra aller bien plus loin que les 5% du Protocole en même temps qu’élargir le périmètre des pays astreints à réduire leurs émissions comme nous allons le voir ci-dessous. En matière d’instruments, le Protocole comporte trois types d’instruments dits « de flexibilité » pour parvenir aux objectifs fixés. Un « marché de carbone » où s’échangent des quotas d’émissions également nommés permis d’émissions, un « mécanisme de développement propre » (MDP) qui permet d’échanger des investissements sobres en carbone des pays industrialisés dans les pays pauvres contre des crédits carbone et, enfin, un mécanisme de « mise en œuvre conjointe » qui vise à faciliter la coopération entre pays industrialisés et économies en transition [3]. Un tel arrangement institutionnel, qui correspond à l’état du monde au moment de son élaboration, devra bien évidement être totalement revu dans le cadre d’un futur accord global.

Il est donc urgent de forger de nouvelles règles reconnues au plan international ; ces règles devant être fondées, comme le proclame la CCNUCC, sur la prise en compte par les différents pays de leurs « responsabilités communes mais différenciées ». Or, comme le résume Chris Patten : « Le Protocole [de Kyoto] distingue les pays développés, qui ont largement créé les problèmes actuels, des pays en développement, qui ont besoin d’assistance pour ne pas créer ceux de demain » [4].

Sur ce point, la lecture des chiffres – que ceux-ci portent sur les émissions passées ou sur celles prévues – est sans appel. S’agissant du passé, il est clair que la responsabilité historique des différents pays n’est pas identique, celle des anciennes nations industrialisées étant bien évidemment plus élevée que celle des pays émergents. Ainsi, pour ne prendre qu’un exemple concernant deux économies sur lesquelles nous reviendrons, entre 1900 et 2004, les États-Unis ont contribué à 30 % des émissions mondiales cumulées de CO2 contre 9 % pour la Chine [5]. Entre 1990 et 2012, les rejets mondiaux de CO2 dus à la combustion de ressources fossiles sont passés de 20,9 à 31,7 Gt (gigatonnes ou milliards de tonnes), soit une augmentation de plus de 51%. Au cours de cette même période, les émissions des pays ayant ratifié le Protocole de Kyoto sont descendues de 8,3 à 7,1 Gt, soit une diminution de plus de 14%. Mais, dans le même temps, les émissions de nombreux autres pays ont littéralement explosé. La différence entre l’évolution des émissions des pays de l’OCDE et des pays non membres de l’OCDE est, à ce titre, particulièrement frappante (Tableau 1) et tout porte à croire que les émissions des pays en transition vont continuer à croître fortement. Ainsi, dans son « scénario de référence », l’AIE (Agence internationale de l’énergie) estime que les émissions de CO2 liées à l’utilisation de l’énergie, qui étaient de 28,8 Gt en 2007, devraient passer à 34,5 Gt en 2020 et 40,2 Gt en 2030, autrement dit connaître une croissance annuelle de 1,5 %. L’AIE précise que les pays non membres de l’OCDE sont à l’origine de la totalité de cette augmentation prévue (11,4 Gt) et que les trois quarts de cette augmentation proviendront de Chine [6].


Source : International Energy Agency, CO2 Emissions from fuel combustion. Highlights (2014 Edition), 2014.

C’est dans ce contexte que se déroulent les négociations et les COP qui, depuis celle de Copenhague en 2009, sont censées forger le régime climatique « post-Kyoto ». La dernière COP en date, la vingtième, s’est déroulée à Lima à la fin de 2014.

La Conférence de Lima : une dernière étape décevante avant la Conférence de Paris

La Conférence de Varsovie (COP 19) – qui s’était tenue en novembre 2013 – avait tenté de fixer une feuille de route en vue de la Conférence de Paris (prévue pour fin 2015) où devrait être finalisé un accord international destiné à entrer en application en 2020. La Conférence de Lima a donc été la dernière COP avant celle de Paris. Dans les premiers jours, l’optimisme semblait de mise. L’ambassadrice française pour les négociations climatiques, Laurence Tubiana, déclarait : « Pour l’instant, le processus de négociation fonctionne. Je ne rencontre aucun pays qui ne veuille pas parvenir à un accord ». Mais elle précisait toutefois que : « La différence de traitement entre les pays développés et les pays en développement ne peut être résolue ici, c’est une question trop politique ».
Nuance pour le moins importante dans la mesure où il s’agit d’un point de blocage essentiel non seulement depuis la Conférence de Bali (COP 13) qui avait lancé en 2007 le processus d’élaboration d’un régime « post-Kyoto » mais encore depuis le début même des négociations climatiques. On rappellera en effet qu’en mars 2001, le président Bush avait rejeté le Protocole de Kyoto notamment au motif qu’il exemptait la Chine de toute obligation de réduction de ses émissions de GES. Or, en 1990 [7], la Chine rejetait moitié moins de CO2 que les États-Unis, aujourd’hui, elle en rejette deux fois plus (Tableau 2).

Il n’est donc pas étonnant dans ces conditions que le résultat de la Conférence de Lima se soit révélé particulièrement décevant. L’accord final rappelle en effet que la COP 21 (Paris, 2015) est censée aboutir à l’adoption « d’un protocole, d’un autre instrument légal ou d’un résultat convenu ayant force légale dans le cadre de la Convention applicable à l’ensemble des parties » (art. 1). Il est naturellement précisé que cet « accord ambitieux » doit « refléter le principe de responsabilités communes mais différenciées et des capacités respectives à la lumière de circonstances nationales différentes » (art. 2). Dit autrement, rien de ferme n’a été acté ni sur le statut juridique du texte à venir ni sur le niveau des réductions d’émission.

Et c’est ainsi que les Parties devront communiquer au cours du premier trimestre 2015 leurs engagements de réduction de GES (art. 13). Ces engagements seront déterminés par les pays eux-mêmes et devront aller au-delà des actions déjà entreprises (art. 9 et 10). Au 1er novembre un rapport sera publié qui fera la synthèse des engagements présentés avant … le 1er octobre [8] (art. 16, b) ! Tout cela ne sera à l’évidence pas trop contraignant puisque l’article 14 indique que les documents d’engagement fournis par les pays peuvent inclure, « afin de faciliter la clarté, la transparence et la compréhension », des « informations quantifiables sur le point de référence (année de référence), les cadres temporels et/ou les périodes de mise en œuvre, […] les hypothèses et approches méthodologiques y compris celles destinées à estimer et à mesurer les émissions de gaz anthropique ».

À la lecture de ces différentes clauses, une conclusion s’impose : il aurait fallu faire preuve d’une remarquable mauvaise volonté pour ne pas réussir à se mettre d’accord sur un texte qui permet à chacun de fixer ses propres réductions d’émissions sans avoir forcément à fournir de base de calcul (et donc de vérification) à ces dernières. Comme le dit à juste titre une ambassadrice européenne : « Il n’y a rien, aucune avancée. Tout est reporté sur le Sommet de Paris. C’est déprimant, car on aurait pu avancer. On préfère jouer avec le feu. […] Si on ne délivre pas un accord dans un an, le processus de l’ONU est mort, Dead, fini » [9]. Le résultat de Lima est en apparence d’autant plus surprenant qu’un mois auparavant la Chine et les États-Unis semblaient s’être impliqués dans la lutte contre le réchauffement climatique lors d’une déclaration conjointe faite en marge du sommet de l’APEC. Cette « séquence » avait, selon Laurence Tubiana, fait naître « un grand sentiment de possibilité » [10]. Toutefois, en matière de relations internationales, les « sentiments » sont souvent trompeurs et, à coup sûr, moins fiables que les analyses.

La déclaration sino-américaine de Pékin : comment les États-Unis et la Chine réaffirment leur totale souveraineté

Le mercredi 12 novembre 2014, à Pékin, en marge du forum de Coopération économique de l’Asie-Pacifique, Barack Obama et Xi Jinping se sont en effet engagés à prendre des mesures afin de réduire les émissions de GES de leurs pays respectifs. Cette décision – saluée en France comme un « accord décisif sino-américain sur le climat » [11] quand le site de la Maison Blanche se contentait de parler d’une « annonce commune » (joint announcement) – mérite d’être analysée de près. On notera tout d’abord que cette annonce conjointe avait été négociée pendant neuf mois dans le plus grand secret, ce qui en dit long sur la véritable volonté de coopération de la Chine et des États-Unis dans le domaine du climat (comme dans bien d’autres d’ailleurs) avec leurs autres partenaires.

Que dit exactement le document approuvé par Pékin et Washington ? « Aujourd’hui, les présidents des États-Unis et de la Chine ont annoncé leurs actions respectives en matière de changement climatique pour après 2020. […] Les États-Unis ont l’intention de réduire d’ici 2025 leurs émissions de 25 à 28% par rapport à leur niveau de 2005 et de faire tous les efforts possibles pour parvenir à 28%. La Chine a l’intention de parvenir à son pic d’émissions de CO2 autour de 2030 et de faire tous les efforts possibles pour l’atteindre avant. Elle a aussi l’intention d’augmenter la part des énergies non fossiles dans la consommation d’énergie primaire à environ 20% d’ici 2030. Les deux parties ont l’intention de continuer à œuvrer afin d’accroitre leurs ambitions au cours du temps » [12].

Une première constatation s’impose : Washington et Pékin ont d’ores et déjà décidé de ce qu’ils feront respectivement d’ici 2020 ou autour de 2030 comme s’il était exclu que la Conférence de Paris puisse aboutir à des demandes d’engagements plus contraignants. Certes, l’intérêt du président américain pour la question climatique comme d’ailleurs pour le développement des technologies vertes n’est pas nouveau.

En 2008, il avait obtenu du Congrès que 100 des 787 milliards de dollars de son plan de relance soient consacrés à des projets environnementaux [13]. Le 24 février 2009, il déclarait devant les deux chambres du Congrès : « Nous savons que le pays qui parviendra à exploiter la puissance de l’énergie propre et renouvelable conduira le XXIe siècle. Et, pour le moment, c’est la Chine qui a lancé le plus grand effort de l’histoire afin de rendre son économie efficiente sur le plan énergétique. […] Je n’accepte pas un futur où les emplois et les industries de demain prendront racine hors de nos frontières. […] Il est temps pour l’Amérique de reprendre son leadership. […] Mais, afin de transformer véritablement notre économie, de protéger notre sécurité et de sauver notre planète des ravages causés par le changement climatique, nous avons besoin de faire de l’énergie propre et renouvelable le type d’énergie économiquement rentable ». À l’évidence, une telle déclaration entrecroise considérations écologiques et arguments économiques, la lutte contre le changement climatique apparaissant alors clairement comme un élément de la stratégie géoéconomique américaine.

En janvier 2011, lors de son discours sur l’état de l’Union, il revint sur la course à l’espace qui avait débuté, un demi-siècle plus tôt, par le traumatisme de la mise sur orbite d’un satellite par les Soviétiques et s’était néanmoins achevée en 1969 par la victoire américaine dans la course à la Lune et déclara : « C’est le moment Spoutnik pour notre génération ». « Il y a deux ans, poursuivit-il, j’ai dit que nous avions besoin d’atteindre un niveau de recherche et de développement que nous n’avions pas vu depuis les grandes heures de la course à l’espace. […] Nous allons investir dans la recherche biomédicale, la technologie de l’information, et tout spécialement dans la technologie de l’énergie propre, un investissement qui renforcera notre sécurité, protégera notre planète et créera d’innombrables emplois ». Ce sera, « le programme Apollo de notre époque ». Mais pour que des percées technologiques engendrent des créations d’emplois encore faut-il qu’existe un marché. Et le président annonçait alors un objectif ambitieux : d’ici 2035, 80% de l’électricité produite aux États-Unis devrait provenir de la mise en œuvre d’énergies propres.

Plus récemment, le 25 juin 2013, Barack Obama présentait à l’Université Georgetown son Plan national d’action pour le climat. Parmi les principales mesures annoncées : l’Agence de protection de l’environnement américaine (EPA) établira d’ici 2015 des normes d’émissions de CO2 pour les centrales à charbon, les terres fédérales devront accueillir des projets éoliens et solaires afin de fournir du courant à six millions de foyers en 2020, 8 milliards de dollars de prêts sur fonds publics seront alloués au développement des technologies vertes [14]. Reste que Barack Obama a perdu les élections de mi-mandat et que les Républicains, désormais majoritaires au Congrès, ne se sont pas privés de dire qu’ils s’opposeraient à la mise en œuvre des mesures annoncées à Pékin. Il faut aussi s’interroger sur le choix de 2005 comme année de référence. En effet, en 2005, les émissions américaines de CO2 s’élevaient à 5,94 Gt. En 2013, elles étaient descendues à 5,3 Gt, soit une diminution de 10,7%. L’une des raisons de cette diminution est bien sûr la crise de 2008. De fait, depuis 2009, les émissions américaines ont oscillé entre 5,5 Gt (2010) et 5,17 (en 2012) [15]. Dit autrement, plus d’un tiers de l’effort promis a été réalisé sans effort particulier.

Du côté chinois, les choses ne sont pas plus encourageantes. En effet, Pékin s’est engagé à ce que ses émissions de CO2 cessent d’augmenter autour de 2030, c’est-à-dire dans 15 ans. Or, même si la croissance chinoise n’est « que » de 5% par ans au cours de cette décennie et demie, cela suffira à l’empire du Milieu pour doubler son PIB et ainsi dépasser les États-Unis. Dit autrement, la Chine souhaite que rien ne lui soit demandé en matière d’émissions de CO2 tant qu’elle ne sera pas devenue la première puissance économique mondiale.

De plus, Pékin ne s’est ni engagé sur le niveau qui sera atteint autour de 2030 ni, bien évidemment, sur une éventuelle diminution qui interviendrait ensuite. Or, l’évolution des émissions chinoises est particulièrement préoccupante (Tableau 2). En effet, en 1990, les émissions chinoises représentaient la moitié des émissions américaines. En 2006 la Chine rattrapait les États-Unis et 7 ans après elle émettait deux fois plus de CO2 que ces derniers !


*En milliards de tonnes. **En tonnes. ***Les chiffres entre parenthèses expriment la part mondiale de la quantité exprimée. Source : PBL Netherlands Environnemental Assessment Agency et European Commission Joint Research Centre, Long-term trends in global CO2 emissions, 2014 Report, p. 22-23.

Certes, ce taux de progression ne peut que se ralentir. Mais il suffirait qu’au cours des quinze prochaines années la Chine n’augmente ses émissions « que » de 50%, ce qui est une hypothèse assez conservatrice, pour que ces dernières atteignent 15 Gt. Or, si l’on souhaite éviter que la température terrestre s’élève de plus de 2°C d’ici 2100, l’espèce humaine ne devrait pas rejeter plus de 1 456 GtCO2 au cours de ce siècle, soit un budget carbone annuel de 14,5 Gt, volume à comparer aux rejets du G2 en 2013 (Tableau 2) [16]. La population chinoise aussi devrait atteindre son maximum autour de 2030 avec 1,45 milliard d’habitants. Dans l’hypothèse d’un volume d’émissions chinoises de 15 Gt à cette date, les rejets par tête chinois passeraient donc de 7,5 tonnes aujourd’hui (la moyenne de l’Union européenne est de 7,3 tonnes) à un peu plus de 10 tonnes.

En fait, l’objectif aussi lointain que vague de Pékin nécessitera peu de sacrifices. En effet, parmi les nombreux facteurs qui vont contribuer à stabiliser à terme les émissions chinoises il y aura par exemple le ralentissement de l’urbanisation mais aussi la modification de la composition du PIB (Tableau 3). En effet, une récente étude de la Banque mondiale a mis en évidence que la part de l’emploi dans l’industrie à toute étape du développement d’une économie a décliné au cours du temps. En ce qui concerne les économies émergentes, cela signifie que le pic de la contribution de l’industrie intervient plus rapidement et à un niveau plus bas que ce ne fut le cas pour les anciennes nations industrialisées [17].

2030 est donc pour Pékin une date idéale. À ce moment-là, selon toute vraisemblance, la Chine sera la première puissance économique du monde, sa population commencera à décroître et la structure de son PIB se sera transformée sous l’effet de la montée en puissance des services. Dans le même temps, la position chinoise dans le domaine des technologies vertes se sera également renforcée.


Source : The Economist, Pocket World in Figures. 2010 Edition, Londres, Profile Books, 2009 et Pocket World in Figures. 2015 Edition, Londres, Profile Books, 2014.

Néanmoins, cela ne signifie nullement que Pékin ne va rien faire dans les années qui viennent en matière de lutte contre la pollution de l’air. Quelques jours avant le sommet de l’APEC dont nous parlions plus haut, Xi Jinping avouait : « Ces jours-ci, la première chose que je fais le matin, c’est de vérifier la qualité de l’air à Pékin, dans l’espoir que la pollution n’incommode pas les hôtes étrangers » [18]. Afin que ces derniers puissent jouir d’un ciel bleu, plus d’un millier d’usines et toutes les administrations avaient été fermées et la circulation automobile fortement restreinte. Malheureusement pour les Pékinois, le sommet de l’APEC ne dure pas toute l’année. La pollution de l’air constitue un véritable fléau pour les Chinois (plus de 650 000 décès prématurés par an) [19] et une source de mécontentement croissant de la population. La fragilisation de la légitimité du Parti communiste qui pourrait en résulter a conduit celui-ci à adopter un certain nombre de mesures [20]. Cette volonté s’incarne notamment dans certaines dispositions des plans quinquennaux (Tableau 4) ou dans l’annonce faite par Pékin le 19 novembre 2014 de stabiliser sa consommation de charbon (66% de son mix énergétique) à 4,2 milliards de tonnes en 2020, contre 3,6 aujourd’hui [21].


* Indique que l’objectif est non pas théorique mais impératif dans le 12e Plan. ** Dans les grandes villes, l’air est jugé de qualité satisfaisante quand le niveau II est dépassé plus de 292 jours par an. Source : OCDE, Études économiques de l’OCDE. Chine 2013, Paris, Éditions OCDE, mars 2013, p. 140.

Il n’en demeure pas moins que l’absence d’engagement de la Chine avant 2030 est susceptible d’avoir de graves répercussions sur les négociations à venir. En effet, si la Chine dont les émissions par tête s’élèvent à 7,5 tonnes, refuse toute limitation d’émissions au cours des quinze prochaines années, on ne voit pas bien ce qui pourrait amener l’Inde ou le Brésil par exemple (pour prendre deux autres BRIC) à s’engager dans une politique vigoureuse de lutte contre le changement climatique alors que leurs rejets par tête respectifs se situent à 1,5 et 2,2 tonnes.

L’Union Européenne, quant à elle, table toujours sur son exemplarité. En 2009, elle avait adopté un plan dite des « 3 fois 20 » : 20% de baisse des émissions, 20% d’énergies renouvelables et 20% d’économie d’énergie. Ce plan court jusqu’en 2020. Cependant, le 24 octobre dernier, les Vingt Huit sont parvenus à un accord plus ambitieux : les émissions de GES devront diminuer d’au moins 40% d’ici à 2030 par rapport à leur niveau de 1990, la part des énergies renouvelables devra atteindre 27% du mix énergétique et 27% d’économie d’énergie devront être réalisées. Cet accord n’a cependant pas été obtenu sans mal. Comme l’a expliqué Herman Von Rompuy, certains pays « contestent l’idée que l’Europe doive faire plus que la Chine ou les États-Unis, et ils voulaient avoir l’assurance de pouvoir rediscuter de certains aspects de l’accord au vu des résultats de la Conférence de Paris. Mais il ne s’agit pas de revenir sur ces trois piliers » [22]. On rappellera à ce sujet que la part de l’UE dans les émissions de CO2 dues à la combustion d’énergies fossiles est passée de 19% en 1990 à 11% en 2012, ce qui correspond à une diminution de 13,8%. Les peuples d’Europe accepteront-ils de continuer longtemps à montrer la voie alors qu’ils ne représentent qu’une partie toujours plus faible du problème ? Si le résultat de la Conférence de Paris devait être décevant, c’est une question qui ne pourrait continuer à être être éludée.[...]»

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Malos digitales, el eje del ciber-mal y la militarización del ciberespacio


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«Ya es oficial. Estados Unidos ya ha designado a los ciber-malos. Son, por orden de importancia: China, Rusia, Irán y Corea del Norte. Dirán que los malos digitales son sospechosamente similares a los malos analógicos, pero aquí esta el quid del asunto: desde 2011 hasta ahora, cuando el Pentágono comenzó a diseñar su estrategia de ciberseguridad, el gobierno estadounidense había sido enormemente reticente a la hora de nombrar por su nombre a otros gobiernos o Estados cono enemigos digitales.

Ese silencio se había roto parcialmente en los últimos meses cuando el Presidente Obama y el FBI acusaron públicamente al gobierno de Corea del Norte de estar detrás del ataque de represalia a Sony con motivo de la distribución de la película “La entrevista”.

Pero la verdadera escalada de ciber-tensión está teniendo lugar con China. Ya en 2013, el Pentágono había acusado a China de estar poniendo a prueba los sistemas informáticos de Estados Unidos con el objetivo de localizar vulnerabilidades que explotar en caso de conflicto. Entonces, Obama firmó una orden ejecutiva encomendando la puesta en marcha de un marco de ciberseguridad nacional y definiendo las ciberamenazas como unas de las más graves que enfrenta Estados Unidos.

Además de moverse en el marco estratégico y de planificación, Estados Unidos también decidió adoptar acciones legales. Así, el año pasado, el Gobierno estadounidense decidió acusar formalmente a cinco funcionarios chinos a los que acusa de orquestar ataques informáticos contra Estados Unidos.  Según Washington, la unidad 61398 del Ejército de Liberación Popular chino habría robado costosísimos secretos industriales y propiedad intelectual a empresas estadounidenses en el sector del acero, el aluminio o la energía nuclear.

Esta unidad, formalmente llamada Segunda Oficina del Tercer Departamento del Ejército de Liberación Popular chino, contaría con miles de empleados y una red de fibra óptica exclusiva para sus fines. La unidad llevaría una década atacando empresas estadounidenses (hasta 141 habrían sido atacadas, según algunos informes, provocando daños económicos que se estiman entre 17.500 y 88.000 millones de euros). El rastreo de los protocolos de internet realizados por los expertos de casi todas estas operaciones conducen invariablemente al mismo punto: una zona militar en el distrito de Pudong, en Shanghai

Al contrario que China, Estados Unidos, parece haber decidido salir a campo abierto  con la publicación de la nueva estrategia de ciberseguridad estadounidense, anunciada por el Secretario de Defensa Ashton Carter el jueves pasado en un discurso pronunciado en el Centro para la Seguridad Internacional y la Cooperación de la Universidad de Stanford.

Puede consultar el documento íntegro (42 páginas), aquí o bien un resumen (aquí). La estrategia tiene tres pilares, dos defensivos y uno ofensivo. El primero, compuesto de 68 equipos, consiste en la defensa de los sistemas informáticos del Pentágono, que posee la red informática más extensa y sensible del mundo. El segundo, que cuenta  con 13 equipos, consiste en la defensa de Estados Unidos, tanto del gobierno como de las empresas y sus ciudadanos, frente a ciberataques provenientes del exterior. Y el tercero, ofensivo, tiene como objetivo apoyar en y desde el ciberespacio las operaciones bélicas, abiertas o encubiertas, que la Casa Blanca asigne al Pentágono: estos “equipos de cibercombate” totalizan ya 27.

De estas tres, sin duda, que el reconocimiento de la tercera es la más novedosa y la que prefigura un nuevo tipo de conflicto militar en el que el asalto a una posición enemiga se producirá por tierra, mar, aire y, también, desde el ciberespacio: “Habrá ocasiones”, dice la estrategia, “en la que el Presidente o el Secretario de Defensa ordenarán al ejército estadounidense conducir operaciones de cibercombate para inutilizar las redes o infraestructuras del enemigo.[...]»

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Café Steiner

terça-feira, 28 de abril de 2015

El mito del progreso

La visión de un salvaje desnudo en su tierra nativa es un hecho que nunca se olvida. Nunca olvidaré el asombro que sentí al ver por primera vez una partida de fueguinos en una orilla indómita y agreste, puesto que de inmediato me vino a la mente la reflexión de que aquellos eran nuestros antepasados. Aquellos hombres iban desnudos y embadurnados con pinturas; su largo pelo estaba enmarañado; echaban espuma por la boca de excitación y su expresión era salvaje, asustada y desconfiada. Apenas disponían de artes y como animales salvajes, vivían de lo que capturaban; no tenían gobierno y se hallaban a merced de cualquier otro que no perteneciera a su pequeña tribu.”
Charles Darwin

«Y dado que la innovación y el progreso se consideraban algo inevitable y muy deseable por parte de los evolucionistas del siglo XIX, la etiqueta civilización anunciaba a bombo y platillo la superioridad, moral, institucional, intelectual y tecnológica de los mismos que la inventaron e hicieron de ella la piedra angular de unos esquemas evolutivos que lo abarcaban todo.

El mito del progreso

Puede que los fueguinos que Darwin vio no tuvieran una forma de gobierno en el sentido que entonces imperaba en Europa, pero ciertamente disponían de medios complejos y efectivos para regular su vida social y política. No hay nada teleológico en la evolución cultural, ni existe nada inevitablemente universal en la aparición de las civilizaciones o de cualquier otro tipo de orden social, y nada que distinga a una cultura como superior en términos creativos o morales respecto al resto.

La promesa del paraíso

En nuestra cultura occidental la fe en el progreso perpetuo nace del cristianismo, al crear esta religión la promesa de un mundo mejor (el paraíso), tras la muerte, una ficción de redención y salvación para los elegidos, para los que tienen fe en Dios; esta visión sustituye a la idea del eterno retorno, una teoría cíclica del tiempo y de los movimientos rítmicos muy enlazada con la realidad (el día y la noche, las estaciones, los ciclos de la luna…).

Pese a determinados acontecimientos del siglo XX, la mayoría de los que viven dentro de la tradición cultural occidental sigue creyendo en el ideal victoriano del progreso. Es la fe sucintamente descrita por el historiador Sidney Pollard en 1968 como “la creencia de que existe un patrón de cambio en la historia de la humanidad […] constituida por cambios irreversibles orientados siempre en un mismo sentido, y que dicho sentido se encamina a mejor”.

Disquisición sobre el mito del progreso

“El mito es una ordenación del pasado, real o imaginario, en patrones que refuerzan los valores y aspiraciones más profundos de una cultura […]. De ahí que los mitos vayan tan cargados de sentido, que somos capaces de vivir y morir por ellos. Son como las cartas de navegación de las culturas a través del tiempo”

Así, para reflexionar sobre la noción de progreso que tienen las sociedades occidentales, debemos de entender que es una noción que se basa en la separación entre cultura y naturaleza, y que ha contribuido a construir una esfera social, tecnológica y económica que ignora el funcionamiento de los sistemas naturales y crece, como un tumor, a costa de ellos.

La revolución científica e ideológica que instaura el proyecto de la Modernidad se amplía y se asienta en el Siglo de Las Luces, momento en el que se afianza la cultura occidental como visión generalizada del mundo. En este período, por una parte aparecen los ideales de la Ilustración basados en la libertad intelectual y el desarrollo del conocimiento emancipado de la Iglesia; por otro, surgen dos fenómenos asociados: el capitalismo y la Revolución Industrial. Fundamentalmente en manos de la economía liberal, la ciencia y su aplicación, desvinculadas de la ética gracias a su halo de objetividad y neutralidad, se ponen al servicio de la industria incipiente y del capitalismo, consiguiendo unos aumentos enormes en las escalas de producción, gracias a la disponibilidad de la energía fósil, primero el carbón, y posteriormente, y hasta hoy, el petróleo. El capitalismo y la Revolución Industrial, con la poderosa tecnociencia a su servicio, terminaron instrumentalizando los ideales de la Ilustración e imponiendo unas relaciones entre las personas y también entre los seres humanos y la Naturaleza, guiadas por la utilidad y la maximización de beneficios a cualquier coste.

Una de las aristas perversas de este proyecto civilizador se evidencia con la crisis ambiental en curso amén de haber privilegiado a la razón como la senda para alcanzar la felicidad anhelada. Esta sujeción de la naturaleza en nombre del progreso y por su política extractiva son muestras inequívocas de la gestación de esta narrativa moderna (cristiana, marxista, capitalista) con el propósito explícito de legitimar el dominio sobre la naturaleza en función de satisfacer las necesidades del ser humano.

Los ‘beneficios’ del progreso

Se tiende a justificar la creencia de que el progreso exige ciertos sacrificios, asumiendo los efectos secundarios que conlleva la tecnología moderna (agresiones al entorno, la contaminación, industria armamentista, la uniformidad en aras a la eficacia…).

Los beneficios que genera la industria moderna para una parte reducida de la población, no dependen tanto de la tecnología como de las fuentes de energía fósil; el crecimiento tecnológico de los dos últimos siglos ha sido posible gracias a la desconsiderada actitud que el hombre ha adoptado al explotar los recursos naturales irrenovables y crear condiciones que deterioran el medio ambiente.

El mito del progreso nos ha prestado buenos servicios (a quienes nos hallamos sentados a las mesas mejor surtidas, en todo caso), y es posible que continúe siendo así. Pero, también se ha convertido en peligroso. El progreso tiene una lógica interna que puede arrastrarnos más allá de la razón, hacia la catástrofe. Un camino seductor lleno de éxitos puede acabar en una trampa.

La industrialización de nuestras sociedades, la racionalización de todas las esferas de nuestra existencia y la búsqueda del control total por parte de los mercados (del tiempo, espacio, cuerpo, relaciones humanas, etc.) encuentran su justificación en la ideología del progreso, compartida por el conjunto de las corrientes políticas. Se postula que la Humanidad se inscribe en un proceso de mejora general que se presenta como lineal, acumulativo, continuo e infinito (de las cavernas a la conquista del espacio). Esta ideología establece un ligamen directo entre los avances tecnocientíficos y las mejoras sociales y políticas (exaltando la creencia en el bienestar material).

Si uno acepta el mito del progreso, se hace con un lugar en la gran marcha de la Humanidad. Pero la Humanidad no marcha hacia ninguna parte. La Humanidad es una ficción compuesta a partir de miles de millones de individuos para los cuales la vida es singular y definitiva.

El concepto de progreso humano se fue construyendo, por tanto, basado en el alejamiento de la naturaleza, de espaldas a sus límites y dinámicas. El desarrollo tecnológico fue considerado como el motor del progreso, al servicio de una idea simplificadora que asociaba consumo con bienestar, sobre todo en las últimas décadas, en las que la sociedad de consumo se ha autoproclamado como la solución para todos los problemas humanos. El lema “si puede hacerse, hágase” se impuso, sin que importasen los para qué o para quién de las diferentes aplicaciones. La ocultación de los deterioros sociales y ambientales que acompañaban a la creciente extracción de materiales y generación de residuos, hicieron que se desease aumentar indefinidamente la producción industrial, creando el mito del crecimiento continuo.

La palabra progreso dotaba de un sentido de satisfacción moral a esta tendencia de la evolución sociocultural. Se consideró que todas las sociedades, de una forma lineal, evolucionaban de unos estadios de mayor “atraso” –caza y recolección o ausencia de propiedad privada– hacia nuevas etapas más racionales –civilización industrial o economía de mercado– y que en esta evolución tan inexorable y universal como las leyes de la mecánica, las sociedades europeas se encontraban en el punto más avanzado. Al concebir la historia de los pueblos como un hilo de secuencias que transitaba del salvajismo a la barbarie, para llegar finalmente a la civilización, los europeos, empapados de la convicción etnocéntrica de constituir la “civilización por excelencia”, expoliaron los recursos de los territorios colonizados para alimentar su sistema económico basado en el crecimiento. Sometieron mediante la violencia (posibilitada por la aplicación científica a la tecnología militar) y el dominio cultural a los pueblos colonizados, a los que se consideraba “salvajes” y en un estado muy cercano a la naturaleza.

Las secuelas del progreso

Esta concepción de progreso, vigente en el presente, ha sido nefasta para los intereses de los pueblos empobrecidos y para los sistemas naturales. La idea de que más es siempre mejor, la desvalorización de los saberes tradicionales, la concepción de la naturaleza como una fuente infinita de recursos, la reducción de la riqueza a lo estrictamente monetario y la fe en que la tecnociencia será capaz de salvarnos en el último momento de cualquier problema, incluso de los que ella misma ha creado, suponen una rémora en un momento en el que resulta urgente un cambio de paradigma civilizatorio.

Muchas de las grandes ruinas que hoy adornan los desiertos y las selvas de la Tierra, son monumentos a la trampa del progreso, recuerdos de civilizaciones que desaparecieron víctimas de sus propios éxitos.[...]»

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